Par un beau soir d’été, au couché du soleil,
Les pieds endoloris par une longue marche,
Un séminariste s’adossa à une arche
Qui enjambait un fleuve où il mis ses orteils.
Il se vêtis plus tard du plus simple appareil
( bien que sans nul doute son strict patriarche
Aurait désapprouvé une telle démarche )
Et s’immergea ainsi dans les reflets vermeils.
Pendant que le jeune homme lavait son patrimoine,
Un chien discipliné lui vola sa soutane
Obéissant à l’ordre d’un berger facétieux.
Mais sa plaisanterie ne lui profita guère,
Contrairement au clerc, car charmée, la bergère
Lui permis de connaitre un moment délicieux.
Une sorcière ligotte une femme-enfant
Après une interminable course-poursuite.
Dans un antre au fond des bois la pauvre est conduite
Traînée par la tueuse au regard triomphant.
D’impatience son estomac vide piaffant,
Elle s’en va remplir son chaudron tout de suite.
Ce faisant elle y décèle une grosse fuite.
Le jetant de rage, un peu plus elle le fend.
Pendant qu’elle essaie de réparer sa gamelle,
L’autre défait ses ficelles et se fait la belle,
Prenant le parti de fuir par le littoral.
Surprise par la marée, elle appelle à l’aide,
Un majestueux et généreux palmipède
S’empresse de soutenir son corps sculptural.
Jusqu’à l’époque de la colonisation,
Nabilha vivait heureuse dans la savane,
Observant les animaux depuis sa cabane,
Ou courant pieds nus derrière des papillons.
Les occupants répandirent leur religion,
Dans son village arriva un homme en soutane
Qui fit la chasse aux rituels jugés profanes
Et décida de prendre en main son éducation.
Il commença par des leçons de catéchisme
Avant de faire une séance d’exorcisme,
Confondant épilepsie et sorcellerie.
Le missionnaire prononça quelques prières
Tout en abusant de son corps d’enfant pubère.
Longtemps la nuit elle poussa d’horribles cris.
Dans la forêt de Brocéliande, au bord de l’eau,
Parmi les cerfs et les loups, ses amis fidèles,
Merlin l’enchanteur jette un sort à une belle
À l’aide d’un peu de gui et de quelques mots.
La voilà avec quasiment rien sur la peau,
Sinon des bijoux et un ruban de dentelle,
Prolongement de sa coiffe traditionnelle,
Qui descend jusqu’à la cambrure de son dos.
Le druide entrouvre alors sa cape et sort sa verge,
Tout en menaçant du doigt la gracieuse vierge,
Afin de la forcer à une fellation.
Prenant dans sa main gauche la plante magique,
Et dans la droite le membre du vieux sadique,
La fée provoque aussitôt sa disparition.
.
*Légende du tableau : « Au grand cérémonial druidique de la cueillette du gui, la femme adultère est pardonnée d’autant mieux qu’elle n’est pas la sienne. Elle va le récompenser avec la divine communion ancestrale. Présent des gaules du culte celtique. La morale est sauve lorsqu’en une passion exquise une belle pénitente savoure, l’orgasme sacré de son bon confesseur, dans la soutane.. »
Avant que d’entrer dans un ordre religieux,
Frère Clovis a connu une intense idylle.
Son amante était de corpulence gracile,
Des cheveux blonds mi-long entouraient ses yeux bleus.
Les amoureux jouaient à un drôle de jeu ;
Nue, elle prenait une attitude servile
Pendant que lui, vêtu d’un costume de ville,
Fouettait ses fesses avec un martinet à nœuds.
Quand elle lui demandait « Est-ce que tu m’aimes ? »
Il lui répondait en déclamant des poèmes
Qu’il avait écrit pour elle, le cœur en feu.
En y repensant il est parfois pris d’un doute ;
« Il se peut qu’en la quittant j’ai fait fausse route,
Avec elle je montais au plus haut de cieux. »
Une jeune gitane est condamnée à mort
Accusée d’avoir pactisé avec le diable.
Dans sa prison défilent prêtres et notables
« Pour être certains qu’elle ne l’est pas à tord ».
Mais, à la vérité, ils ont l’esprit retord,
Leur mobile pour la voir est inavouable ;
Un grain de beauté la rend des plus désirables,
Ornant la partie la plus charnue de son corps.
Après avoir longuement contemplés ses fesses,
Ils affirment, fidèles à leur grande bassesse,
Qu’il s’agit de la signature de Satan.
La jeune femme obtient d’assister à l’office,
Avant d’être livrée au bras de la justice,
Frère Clovis la sauve alors des mécréants.
La neige tombait drue cet après-midi là.
En raison de cette météo difficile,
Un homme était bloqué dans son automobile,
Laissant des bonnes soeurs dans un grand embarras.
Elles avaient une centaine d’enfants sur les bras,
Dont certains étaient de plus en plus indociles,
A force d’être obligés d’attendre immobiles,
La venue tant désirée de Saint Nicolas.
Une novice fit elle-même l’évêque,
Elle se travestit dans la bibliothéque
Se croyant à l’abri du regard des curieux.
Frère Clovis qui était alors un élève,
Soulevant un rideau la vit en tenue d’Ève
Ému par sa beauté il crut dès lors en Dieu.
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« Ce qui m’intéresse le plus dans mon oeuvre, c’est sa valeur intrinsèque : la couleur, la matière. Ce qui n’intéressait pas Breton; il n’était pas rétinien; il ne voyait que l’histoire. Ce qui compte, c’est la composition, la matière : ce que j’étudiais au Musée de Picardie en présence de Velázquez. Je me situe de façon très indépendante. Je n’ai jamais admis le cubisme. Ça ne m’émouvait pas. J’aime peindre la beauté féminine. J’ai cherché toute ma vie ce qu’il y avait de plus beau dans la nature pour l’exprimer dans mes tableaux. Je n’ai rien trouvé de plus beau que le nu de jeune fille. Pour les hommes qui sont hommes, c’est un spectacle émouvant. Par le sexe de la femme, c’est Dieu qui se révèle. Je ne me suis pas attaché à peindre des hommes dans mes tableaux. Vous savez, l’homme, c’est pas drôle. »
Clovis Trouille
PS ; Pour donner le contexte de cette dernière affirmation, Clovis Trouille a été sept ans soldat, dont quatre pendant la « sale » guerre comme il l’appelait. Cet événement l’a durablement traumatisé.
Clovis Trouille, La rue des enfants trouvés, détail.
Aujourd’hui à Alger, un fort vent vient du nord,
Des paquets d’écume témoignent d’une houle.
Une jeune nonne est venue pêcher des moules
Sur des rochers à une encablure du port.
Alors qu’elle remplit son panier à ras bord,
Une vague géante sur la plage roule ;
La soeur est immergée jusqu’en haut de sa coule,
Ne sachant pas nager elle risque la mort.
Un zouave suave écoutant son courage,
Se jette à la mer pour faire son sauvetage,
Il la sort vivante en la portant dans ses bras.
La rescapée met sa main dans son sarouel rouge,
Autour de son sexe turgescent ses doigts bougent,
Il serre son sein arrivé au nirvana.
Clovis Trouille, Sous le culte des sorcières en flirt, détail, 1943.
Un jour Frère Clovis eu une apparition
D’une magnificence jamais égalée.
Elle le laissa les bras ballants, bouche bée,
Les yeux révulsés et le sexe en érection.
Entourée d’une multitude de lampions,
Une beauté à la poitrine dénudée,
Se balançait dans une belle nuit bleutée.
Elle était vêtue avec sophistication ;
Guêpière en satin rouge, porte-jaretelles,
Bas fuchsia, longues mitaines noires en dentelle,
Bottes dorées avec lacets et talons hauts.
Il en parla à son directeur de conscience
Qui feint de ne pas bien comprendre l’expérience,
Pour pouvoir lui demander d’en faire un tableau.